Italienne scène
Ciné 13 Théâtre
Guide de survie pour metteur en scène surmené évoluant en terrain hostile
Antoine Markowsky, metteur en scène esseulé de la Traviata, vit un véritable cauchemar : son temps est compté, la plus grande partie du budget du spectacle est passée dans un canapé dont il ne sait que faire, les chanteurs sont soit absents, soit ingérables, soit totalement inhibés, et la musique, à son grand malheur, prime toujours sur l’interprétation.
Pourtant, il aimerait tellement toucher la beauté de cette œuvre magistrale, dépasser les conventions mille fois répétées depuis 150 ans !
Le temps presse, l’heure de la première approche, déjà les musiciens accordent leurs instruments : Markowsky parviendra-t-il à ses fins ?
« Et dans « joie de chanter des choses douloureuses », ce n’est pas douleur qui est important mais joie. C’est pour atteindre la joie qu’on chante des choses tragiques.
Entrez avec la même intimidation que Verdi devant sa page blanche avant qu’il n’invente les notes que vous allez chanter.
A quelle école étiez-vous ? J’en étais sûr. Ils vous apprennent à jouer pour les abonnés. Vous devez jouer pour celui qui ne sait rien, qui vient à l’opéra pour la première fois.
Et si vous acceptez de ne rien savoir vous-même, il pourra penser qu’il y a une petite place pour lui à côté de vous sur le plateau. »
Générique
Avec Mathieu Alexandre, Benjamin Brenière, Katia Ghanty, Elise Noiraud, Thomas Nucci, Maud Ribleur
Costumes Coralie Robert, Musique Giuseppe Verdi, Lumières Jennifer Montesantos
Production Théâtre de l’Epopée
Presse
Victorien Robert met en scène « Italienne scène », une comédie délirante de Jean-François Sivadier. Si tout n’est pas parfait, le spectacle présente « un généreux et bordélique laboratoire d’humanité », conformément à l’intention de l’auteur. Alors pourquoi bouder son indéniable plaisir ?
Un lieu : une salle de répétition. Un but : la représentation de la Traviata. Avec ça, une pléthore de personnages hauts en couleur. Il y a ainsi un ténor incapable de se taire, une chanteuse incapable de ne pas tout problématiser, un chef d’orchestre sympathiquement despotique et incapable de s’entendre avec le metteur en scène, lui-même incapable de faire une critique franche. Tel est l’argument d’Italienne scène.
Peu ou pas d’intrigue donc, mais des personnages qui, mis ensemble, créent des cascades de situations, d’imbroglios jusqu’à la frénésie. Comme dans tous les opus de Sivadier, une figure se détache tout de même. Ici, c’est celle du metteur en scène. Antoine Markowsky essaie en effet vainement d’instiller un peu d’harmonie dans la cacophonie ambiante tout en y contribuant (situation à la Woody Allen). C’est bien connu, l’enfer, c’est les artistes ! Mais, de manière plus générale, on retrouve toutes les caractéristiques du travail de Sivadier à la scène : un joyeux bordel, une folle énergie associée à un travail choral, le surgissement de l’incongru et donc du rire. Tout ça, c’est beaucoup. C’est même toujours et volontairement trop.
Comme dans les Acteurs de bonne foi
C’est donc corollairement un formidable stimulant pour un jeune metteur en scène et… une gageure pour les comédiens. Pas facile d’assumer un texte écrit pour des bêtes de scène comme Nadya Vonderheyden ou Nicolas Bouchaud ! D’autant moins aisé que la mise en scène de Victorien Robert enfonce le clou : pas de dispositif vidéo, de scénographie tarabiscotée. Au contraire, le plateau est vide. À peine quelques guirlandes suspendues évoquent-elles le monde de Violetta. Ne restent sur scène qu’un indispensable piano de répétition, un escabeau, un projecteur. Par ailleurs, les « chanteurs » ne portent pas encore leur costume. Rien ne vient donc distraire de l’interprétation. Et pour ajouter à la difficulté, il s’agit de jouer des chanteurs, voire une régisseuse, qui s’essaient au théâtre. Comme dans les Acteurs de bonne foi s’imposent deux niveaux de jeu qu’il faut impérativement distinguer : le jeu forcé et maladroit, et le jeu naturel… de personnages qui, difficulté supplémentaire, sont ici pittoresques.
Alors, quel est le résultat ? Ca marche. Car on frissonne devant la piètre interprétation de Violetta qui ouvre la pièce (premier niveau), puis on croit au personnage de Majeva qui l’interprétait (deuxième niveau). Et il en va de même pour les autres personnages. Autre aspect plutôt réussi : la mise en exergue d’une des intentions du texte, à savoir la réflexion sur le statut du public. Dans Italienne scène, de fait, le public devient le chœur en répétition. C’est pourquoi on le sollicite, on le rassure et on l’amadoue. Or, si pour une question d’accessoires, il n’est pas évident de saisir d’emblée que les rideaux noirs de fond de scène s’ouvrent sur la salle d’opéra, la mise en scène offre, en revanche, des trouvailles qui soulignent l’implication du public.
Sivadier présente Italienne scène et Orchestre comme une partition sur laquelle les comédiens seraient invités à improviser. Victorien Robert fait le choix de jouer allegro. Et l’on rit vraiment. On se souviendra des quelques apparitions désopilantes du chef d’orchestre (Thomas Nucci) pince-sans-rire, comme du bel aparté d’Alessandro (Benjamin Brenière) sur son maître de musique, ivre d’harmonie et de vodka. On gardera en soi alors l’image de cet homme qui voulut être Boris Godounov et le fut, sur un toit, quitte à en mourir de froid. Un spectacle riche, donc, à qui la jeunesse apporte la fougue et dont les imperfections dessinent les promesses. ¶
Laura Plas – Les Trois Coups
Italienne scène nous montre un jeune metteur en scène dans les affres de la préparation de la Traviata; bien évidemment rien ne va, à commencer par l’absence de l’interprète principale remplacée pendant les répétitions par la stagiaire bonne à tout faire; le jeune premier intervient sans cesse fort mal à propos, la jeune chanteuse est angoissée , la pianiste est allemande et le chef d’orchestre atrabilaire dirige le chœur, rôle donné au public.
Les retards s’accumulent, la situation ne semble jamais s’améliorer, et, même fréquente pas ce côté du théâtre, on a l’impression que tout cela est vrai : les caprices, les réglages, l’angoisse du temps qui fuit sans pouvoir avancer.
Caricature réussie des coulisses de la création d’un spectacle, on voit que l’auteur, Jean-François Sivadier parle de ce qu’il connaît. Le vrai metteur en scène, Victorien Robert a adapté ce texte avec talent. On s’amuse énormément à cette comédie, qui présente les coulisses de la création, très bien interprétée par des acteurs excellents et débordants d’énergie, et une mise en scène inventive et tonique. Un spectacle totalement réussi.
Marie-Claude BRETAGNOLLE – La Provence
Prix & réservations
Billeterie en ligne sur le site du Ciné 13 Théâtre
ou par téléphone au 01 42 51 13 79
(ouvert les lundis et mardis de 17h à 19h et du mercredi au samedi de 17h à 21h)
Prix des places :
Plein tarif 26€
Tarif réduit 18€ (Abonnés du Théâtre 13, habitants du 18ème, demandeur d’emploi, intermittent, – 26 ans, +60 ans)
Ciné 13 Théâtre
1, avenue Junot
75018 Paris
Métro : Ligne 12 station «Abbesses» ou «Lamarck Caulaincourt»
Monmartrobus : arrêt «Moulin de la galette»
Bus : ligne 80 arrêt «Lamarck Caulaincourt»
Parking : Dancourt, 5 rue Dancourt / Custine Automobiles, 48 rue Custine.
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