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Bérénice

de Racine
mise en scène Victorien Robert
Du 4 au 4 décembre 2014
T13 / Bibliothèque
1h


Si l’objet de Bérénice est entre autres choses d’évoquer la défaite de l’amour face à la raison d’État, il est aussi de présenter trois personnages dépendant les uns des autres sur le plan affectif, à qui l’idée même de renoncer à cette affection est insupportable. Ce qui se passe sur un plateau de théâtre, et plus encore dans une tragédie, n’a rien d’anodin : les sentiments et les émotions sont ici exprimés dans leur valeur absolue. Un amour si fort que les mots peinent à en exprimer l’ampleur, un renoncement si inconcevable que le choix de mourir se présente comme une alternative moins douloureuse.

avec Mathieu Alexandre, Benjamin Brenière, Katia Ghanty, Maud Ribleur


Le texte de la pièce est disponible au format numérique sur le site internet
et l’application gratuite des Presses Électroniques de France

 

Note d’intention

« C’est l’une des tragédies de ma vie ». Je suis tombé par hasard sur cette phrase dans un récit autobiographique. Le narrateur y évoquait la vente d’un piano sur lequel il avait appris à jouer étant enfant. J’ai réalisé que ma vie aussi était semée de tragédies de ce genre, qui m’avaient façonné, en laissant des blessures parfois profondes, pour certaines à peine cicatrisées. De fait, nous portons tous en nous des histoires, visiblement anodines, mais qui revêtent pourtant une importance particulière, voire fondamentale dans notre parcours, dans notre façon d’agir et de penser tout au long de notre vie. Et s’il est une tragédie assez universelle dans la construction de chacun, une tragédie dont nous faisons encore l’expérience assez tard, c’est bien celle de l’amour déçu, du parfum d’inachevé, d’inabouti, de l’impossible, qui nous dévore malgré nous.

A ce titre, Bérénice est une tragédie dans laquelle nous pouvons nous reconnaître.

Si l’objet de Bérénice est entre autres choses d’évoquer la défaite de l’amour face à la raison d’État, il est aussi de présenter trois personnages dépendant les uns des autres sur le plan affectif, à qui l’idée même de renoncer à cette affection est insupportable. Ce qui se passe sur un plateau de théâtre, et plus encore dans une tragédie, n’a rien d’anodin : les sentiments et les émotions sont ici exprimés dans leur valeur absolue. Un amour si fort que les mots peinent à en exprimer l’ampleur – le chant des alexandrins est d’ailleurs une solution à l’indicible -, un renoncement si inconcevable que le choix de mourir se présente comme une alternative moins douloureuse.

En somme, il y a dans Bérénice de nombreux éléments des raisons pour lesquelles il me paraît important d’investir un plateau de théâtre : d’une part, pour y amener le public à s’y reconnaître et à réfléchir sur sa condition, d’autre part, pour y représenter des situations qui ne trouveraient dans la vie quotidienne que des réponses inadaptées car elles sont trop fortes pour être vécues.

Nous nous présentons devant ce texte avec beaucoup d’humilité, soucieux de respecter le vers et la poésie de l’œuvre, mais également avec la volonté d’étudier comment nous l’abordons du haut de notre trentaine d’année, comment nous pouvons étirer les enjeux et préciser pourquoi ils nous parlent si bien. Dans notre travail de création, après avoir réfléchi longuement à ce dont nous parlions, nous allons aussi nous laisser le temps d’improviser, de retrouver de situations qui nous sont proches, de toucher à nouveau du doigt des sensations vécues parfois il y a bien longtemps, pour lancer une passerelle entre ce texte et nos personnalités.

C’est une forme légère. Une comédienne incarne tour à tour Arsace, Phénice et Paulin, les trois confidents, pour concentrer l’action sur cet inlassable cortège d’indécisions, de cris du cœur, de fuite, de chantage au suicide. « Ma mort contre ton amour », voilà le marché impossible que chacun semble vouloir passer ici, en forçant l’autre à l’aimer sans vouloir pour autant violer sa liberté.

Il est si simple de tomber du côté de la tragédie ou de la comédie, ce qu’il faut avant tout, c’est être sur la corde raide… Peter Brook.



Le cœur de notre travail visera enfin à chercher comment transmettre un tel texte, comment le rendre intelligible sans s’affranchir du pathos dont il est imprégné, comment parler ses alexandrins sans en troubler la musique. Comme souvent, il nous faudra donc trouver un équilibre, rester « sur la corde raide ». Pour que ce texte, et le spectacle dans sa forme finale, puissent être compris de tous et pas seulement de ceux qui l’ont déjà lu, étudié, interprété. Nous évoquons là un sujet intemporel et universel, il serait trop dommage de ne le réserver qu’à certains.

Victorien Robert

 

La compagnie

La Compagnie Ermolaï

Ermolaï est une compagnie née en 2013 avec l’impulsion d’un premier spectacle, Italienne Scène, de Jean-François Sivadier, mis en scène par Victorien Robert, qui a obtenu le Prix du Public, la Mention spéciale du Jury et le Prix du Théâtre de l’Opprimé lors du Prix Théâtre 13/Jeunes Metteurs en scène 2011.

Il s’agit pour nous de mettre à profit la construction de cette famille artistique, mêlant aussi bien comédiens que scénographes, graphistes et costumiers, de faire vivre sa jeunesse et son enthousiasme à travers des projets ambitieux

Le nom d’  » Ermolaï  » provient d’Ermolaï Vakoliavitch, personnage fictif évoqué dans Italienne Scène. Ermolaï est un vieux professeur de chant lyrique qui met en avant l’importance du désir pour l’artiste.

« Il chantait parfaitement juste et en mesure avec des graves à t’exploser la tête il a chanté

Le rôle en entier ça a duré toute la nuit le chien s’est endormi pendant le premier acte et moi

J’avais envie de monter à côté de lui  pour m’exploser la tête avec ses vibratos comme un volcan en irruption et des gens se sont réveillés dans leurs maisons et ils ont commencé à l’insulter

Et puis ils ont arrêté de l’insulter ils sont descendus dans la rue avec des parapluies pour assister au spectacle d’ Ermolaï Vakoliavitch celui qui m’a tout appris et j’ai pensé

« O sois fier mon petit père voilà tu l’as chanté sois fier il y a des gens et un petit chien qui t’auront vu chanter Boris » et cette nuit là il s’est passé quelque chose c’est quand je l’ai vu tout maigrelet sous la pluie battante accroché à son rêve comme un enragé le pauvre diable comme un géant sur le toit de la chapelle dans le grand manteau rouge du tsar Godounov

C’est là que j’ai compris que le désir, le désir… »

Comme lui, nous voulons garder ce désir chevillé au corps et conserver le plus longtemps possible l’envie et l’étonnement à l’idée de nous trouver sur un plateau. Notre compagnie a vocation à faire un théâtre de qualité qui s’adresse à tous, partir du principe que le public ne connaît ni la fin des intrigues, ni les alexandrins au pied près, travailler avec exigence sans jamais abandonner pour autant une indispensable légèreté.
 



Victorien Robert (Mise en scène)

Victorien Robert est comédien et metteur en scène. Il a créé la Compagnie Ermolaï, dont il assure la direction artistique.

Il commence le théâtre après avoir étudié à Sciences Po Bordeaux et suit les cours de Blanche Salant à l’Atelier international de Théâtre, avant de rejoindre les ateliers du Sudden de Raymond Acquaviva tout en travaillant parallèlement avec l’école Charles Dullin. Grâce à cette grande diversité d’enseignements et de rencontres, il a pu prendre part à de nombreux spectacles comme Les Justes de Camus, Mesure pour mesure de Shakespeare, Andromaque de Racine, L’Opéra de quat’sous de Brecht, ou encore Lancelot, le chevalier de Merlin, de Gaëtan Peau, aux côtés de metteurs en scène tels que Franck Berthier, François Bourcier ou  Quentin Defalt.

Il réalise sa première mise en scène, Italienne Scène, de Jean-François Sivadier, en 2011. Le spectacle est présenté au Prix Théâtre 13/Jeunes metteurs en scène, où il remporte le Prix du Public, la Mention Spéciale du Jury et le Prix du Théâtre de l’Opprimé.

Il entreprend enfin un travail d’écriture et de création collective avec les comédiens d’Italienne Scène, intitulé Pierre Guy, d’après Peer Gynt d’Henrik Ibsen.

 

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