Andorra
T13 / Bibliothèque
À la fois cruelle, drôle et bouleversante, Andorra est une mise en lumière des mécanismes sournois de la haine et de l’exclusion. Un portrait acide et sans concession de ces « petites gens » qui les attisent et les propagent mais aussi de ceux qui en deviennent les victimes expiatoires.
Écrite en 1961, la pièce est un formidable appel à la vigilance, à la résistance, au refus de l’obéissance aveugle et résonne encore aujourd’hui de toute sa vérité.
Dans un petit pays fictif, un jeune homme meurt au nom d’une identité qui n’est pas la sienne. Comment cela a t-il pu se produire ? Débute alors une enquête / reconstitution, à la découverte de ce pays et de ses habitants.
Ce jeune homme, c’est Andri. Un jeune juif que le maître d’école aurait, selon la version officielle, courageusement adopté pour le sauver de l’Etat voisin qui le persécutait. Mais l’acte, jugé héroïque par la population est très vite perçu comme dangereux et compromettant lorsqu’une menace d’invasion se précise… Là, cette même population se dit qu’il vaudrait peut-être mieux rendre cet encombrant réfugié.
À coup de petits mensonges, d’arrangements, de compromissions et de fantasmes, les habitants, grandioses de mauvaise foi et affligeants de lâcheté, vont sournoisement fabriquer leur ennemi …
Un petit souci toutefois : le garçon se révèle très vite ne pas être juif du tout…
Sur le plateau, trois pans de murs noirs mobiles, qui dès le début de la représentation seront peints en blanc. Ils deviendront une rue, une place, l’intérieur d’une maison, un chemin de fuite, un écran… Un travail de troupe choral, précis et exigent, pour porter cette histoire, à la fois vivante, rythmée, émouvante et violente.
Bien sûr, ce que dénonce Andorra est d’une très grande gravité. Mais sa forme, avec notamment le portrait des villageois – grandioses de mauvaise foi et affligeants de lâcheté – est l’occasion de scènes d’une très grande drôlerie.
Après Je pense à toi, Marie Stuart, A mon âge je me cache encore pour fumer et Le Cercle de craie Caucassien, le nouveau spectacle de la Compagnie Orten au Théâtre 13.
Générique
Avec
Alban Aumard Le Docteur,
Anne Coutureau La Senora,
Romain Dutheil Andri,
Stéphanie Labbé L’Aubergiste,
Hugo Malpeyre Le Soldat,
Laurent d’Olce Le Maître d’école,
Loïc Risser Le Prêtre,
Marie-Céline Tuvache La Mère,
Elisabeth Ventura Barbeline,
Eric Wolfer Le Menuisier,
et les témoignages de Jean Patrick Gauthier, Philippe Ivancic, Gaëtan Peau, Benjamin Penamaria, Philippe Perrussel, Paula Brunet Sancho, Vincent Viotti.
Traduction Armand Jacob. L’Arche est agent théâtral du texte représenté.
Adaptation et scénographie Fabian Chappuis,
Assistant à la mise en scène Emmanuel Mazé,
Musique Cyril Romoli,
Chorégraphie Yann Cardin,
Lumière Florent Barnaud,
Vidéo Bastien Capela & Quentin Defalt, Régie vidéo Ludovic Champagne,
Costumes Maud Berthier et Domitille Roche-Michoudet,
Masques Sébastien Puech,
Construction décor William Defresne & Thierry Ortie (Comme sur un plateau),
Administration François Nouel,
Diffusion Isabelle Decroix,
Presse Jean-Philippe Rigaud.
Adaptation éditée aux Editions Les Cygnes – collection Les Inédits du Théâtre 13.
Production Compagnie Orten, Coproduction Théâtre de Bagneux, avec le soutien du Festival d’Anjou – Prix des compagnies 2013, d’ID Production, d’Arcadi Île-de-France, de l’Adami, de la Spedidam, de Tolomei, de la Fondation pour la mémoire de la Shoah et du Théâtre 13 / Paris.
La compagnie Orten & Fabian Chappuis
De nationalité française et allemande, il est formé à l’art dramatique par Colette Nucci de 1992 à 1996, dont il rejoint la compagnie en 1995, tout d’abord en tant que scénographe, puis à la mise en scène (Paradis sur terre de Tennessee Williams en 1995, Une lune pour les déshérités d’Eugène O’Neill en 1996). En 1998, il crée la Compagnie Orten, dont il adapte, met en scène et scénographie tous les spectacles.
Les premières créations de la compagnie explorent des univers qui allient poésie et littérature, art vidéo, danse et musique contemporaine (Finalement, les choses ne vont pas si mal que ça en 1998 et 99, Je pense à toi de Frank Smith en 2000, Loin d’eux de Laurent Mauvigner en 2001).
Avec Marie Stuart de Schiller en 2008, la compagnie aborde ses premiers textes écrits pour le théâtre tout en débutant un travail de réflexion autour du lien entre pouvoir et intime. Marie Stuart marque aussi le désir de créer des spectacles de troupes, avec souvent des équipes nombreuses. Le spectacle sera également le premier succès public et critique de la compagnie, avec plus de 100 représentations en France sur trois années. En 2014, les costumes du spectacle participeront à l’exposition « Costumer l’Histoire » à la Cité Royale de Loches.
Suivra en 2009, la création de A mon âge, je me cache encore pour fumer, commande de son auteur Rayhana. Plaidoyer pour la tolérance, contre l’oppression et la violence faites aux femmes, le spectacle sera créé à La Maison des métallos. Quatre tournées auront lieu (dernière prévue en mars 2014), dans des théâtres de Ville et Centre Dramatiques Nationaux avec une participation au Festival « le Printemps de Beyrouth » au Liban. Le spectacle a été diffusé sur France Télévision et fera l’objet d’une adaptation au cinéma. Avec l’agression violente de son auteur au moment de la création, le spectacle connaîtra une couverture médiatique importante, malheureuse vitrine pour le combat de Rayhana en faveur des femmes et contre l’intégrisme sous toutes ses formes. A ce jour, le spectacle compte plus de 150 représentations.
En janvier 2013, la compagnie créé Le Cercle de craie caucasien de Bertolt Brecht au Théâtre 13 / Paris. Mis en scène comme un conte, avec l’utilisation de marionnettes et masques, le spectacle est une réflexion autour la filiation, mais aussi de la justice et de la liberté. Il recevra le Prix du jury au Festival d’Anjou – Prix des compagnies 2013, le comédien Florent Guyot sera également distingué par les Beaumarchais du Figaros.
Fin 2013, Emmanuelle Devos remettra à la compagnie le Prix Théâtre Adami 2013 pour l’ensemble de son travail.
En parallèle, la compagnie travaillera également sur des plus petites formes, notamment avec Le Livre des 14 semaines de et avec Sapho (2004), Dans la Solitude des Champs de Coton de Koltès (2007) ou encore la lecture de Les heures blanches de Niels Arestrup avec Michel Aumont (dans le cadre du Festival Nava à Limoux en 2010).
Parallèlement, Fabian Chappuis a collaboré à de nombreux projets autour de la danse, du théâtre et du cinéma, notamment au Forum des Images de Paris et à la Ménagerie de Verre.
Depuis 2000, il seconde Colette Nucci à la direction du Théâtre 13 – scène municipale de la Ville de Paris.
Edito
Par Colette Nucci – Directrice
Ils étaient tous beaux, ils étaient jeunes. Ils étaient le visage de la France qu’on aime, celle de la culture, de la diversité, de la tolérance, de la liberté d’expression et de la fraternité des hommes. Ils étaient sortis ce vendredi 13 novembre 2015 pour aller voir un concert ou dîner entre amis à la terrasse d’un café, la soirée était si belle, si douce pour un mois de novembre… Ils s’appelaient Thomas, Nicolas, Élodie, Précilia, Romain, Nathalie, Manu, Asta, Nohemi, Amine, Halima et Hodda, Lamia, Sébastien, Marion et Anna, Luis Felipe, Cécile… Et Kheireddine, ce jeune violoniste algérien de 29 ans qui a survécu à dix ans de terrorisme dans son pays et qui est au nombre des cent vingtneuf victimes qui ont trouvé la mort ce soir-là à Paris sous les balles meurtrières de l’obscurantisme, la bêtise, l’intolérance, la haine ; Et il y a des centaines de blessés !
Comment réagir face à une telle barbarie, comment trouver les mots justes pour consoler ceux qui restent, comment ne pas céder à cette tentation bien légitime du repli sur soi, résister à la peur, à la colère ? « Vous n’aurez pas ma haine » a écrit l’un des survivants de ce carnage où sa femme est morte, et c’est une réponse magnifique à ces semeurs de haine et de mort dont l’objectif est de nous empêcher par la terreur de chanter, de rire, d’aller au théâtre, au concert, de penser librement, de vivre tout simplement ! Aujourd’hui nous avons besoin de pleurer nos morts, mais demain nous irons tous au bistrot, au théâtre, dans les musées parce que c’est ainsi que nous vivons dans notre beau pays, que la culture en fait partie intégrante, et qu’il n’est pas question de laisser une poignée d’illuminés fanatisés nous imposer leur vision mortifère et sinistre de la vie ; Ceux qui sont morts ont été choisis parce qu’ils représentaient une jeunesse instruite, éduquée, active, une jeunesse avec des perspectives d’un avenir radieux, leurs bourreaux avaient le même âge, mais ne s’étaient construit aucun avenir dans notre société… Qu’est-ce qui n’a pas fonctionné dans notre République pour que des gamins nés en France, des français donc, aient cette haine pour leur pays, et ne rêvent que de le détruire ? Une chose est sûre, il n’y a plus de temps à perdre en atermoiements et querelles de partis. Seules l’instruction et l’éducation, soutenues par les acteurs de la culture, peuvent sauver ces mômes de l’endoctrinement et de la haine ; la tâche est immense mais elle en vaut la peine !
Au Théâtre 13, en ce début d’année 2016 nous accueillons Andorra de Max Frisch, oeuvre majeure en Allemagne et rarement montée en France… Il y est question des mécanismes sournois qui peuvent conduire des hommes à la haine et à focaliser cette haine sur une personne en particulier qu’ils estiment responsable de leurs problèmes ; On est au coeur de l’actualité hélas, mais si le thème est grave et universel, ce spectacle tragi-comique est un appel à la résistance contre les mensonges, les manipulations, les lâchetés auxquels nous nous soumettons trop souvent par paresse intellectuelle ou intérêt personnel, au mépris des conséquences tragiques qu’à long terme ces comportements « de confort » auront un jour ou l’autre dans notre société… La réalité vient de nous rattraper et le réveil est brutal.
La mise en scène de Andorra est assurée par Fabian Chappuis et il a réuni autour de lui quelques-uns des acteurs qui l’accompagnent depuis des années dans ses spectacles.
C’est une création pour le Théâtre 13, j’ai foi en lui, je sais que son spectacle sera beau et fort, j’ai confiance en vous, vous serez là pour lui, pour les artistes, pour toute notre équipe ; plus que jamais nous avons besoin les uns des autres !!
Max Frisch
Max Frisch (1911-1991)
Max Rudolph Frisch est né le 15 mai 1911 à Zurich. En 1930, il commence des études en germanistique à l’université de Zurich mais doit les abandonner pour raisons financières après la mort de son père en 1933. Il travaille alors en tant que correspondant pour le journal Neue Zürcher Zeitung. Entre 1934 et 1936, il entreprend différents voyages à travers l’Europe de l’Est et du Sud-Est et se rend pour la première fois en Allemagne en 1935. Son premier livre, Jürg Reinhart: Eine sommerliche Schicksalsfahrt est publié en 1934.
De 1936 à 1941, il étudie l’architecture. Au début de la Seconde Guerre mondiale, il devient canonnier dans l’armée suisse et reste en service jusqu’en 1945 pour un total de 650 jours.
Son premier projet architectural se concrétise en 1942, lorsqu’il gagne la mise au concours pour la construction d’une piscine publique située au centre de Zurich.
En 1947, il fait la connaissance de Bertolt Brecht et Friedrich Dürrenmatt à Zurich qui ont une influence sur sa production littéraire. En 1951, il reçoit une bourse de la fondation Rockefeller et passe une année aux États-Unis. En 1954, il se sépare de sa famille, puis ferme son bureau d’architecte en 1955 pour travailler exclusivement en tant qu’écrivain indépendant.
Dans le cadre du Scandale des Fiches en 1990, il apprend qu’il a été espionné par les autorités suisses tout comme de nombreux autres citoyens du pays.
Le 4 avril 1991, Max Frisch meurt des suites d’un cancer dans son appartement de Zurich.
Inspirée par Brecht et l’existentialisme, son œuvre, qui épouse des techniques diverses dont celle du journal intime, fait souvent appel à l’ironie, au burlesque ou au registre tragi-comique et comporte des éléments autobiographiques. Ses pièces de théâtre et ses romans traitent de certains thèmes clés, liés à la crise intime et fonctionnelle des sociétés modernes : le conflit entre identité personnelle, communautaire et sociale, la question du double et de l’altérité, l’influence du hasard et du destin, l’errance géographique et existentielle, le rôle de la nature et du mythe, la relation imparfaite entre les sexes, la vie ratée ou encore la confiance et la trahison.
Bibliographie (traductions françaises)
Je ne suis pas Stiller (1957), Monsieur Bonhomme et les incendiaires (1961), Homo Faber, un rapport (1961), J’adore ce qui me brûle, ou les Difficiles (1963), Journal 1946-1949 (1964), Andorra (1965), Le Désert des miroirs (1966), Le Comte Oederland, Histoire atroce et morale en douze tableaux (1968), Don Juan ou l’amour de la géométrie (1969), La Grande Muraille (1969), Biographie : un jeu (première version – 1970), Souvenir sur Brecht (1970), Journal 1966-1971 (1976), Montauk, récit (1978), L’Homme apparaît au Quaternaire Trad. de l’allemand par Gilberte Lambrichs (1979), Triptyque, trois tableaux scéniques (1980).
Résumé
Andorra est un petit pays imaginaire qui attend avec angoisse l’invasion des Casaques Noires, les redoutables soldats de la dictature voisine. Jusqu’ici, il s’agissait d’un îlot de tranquillité, autoproclamé pur et «vierge de toute culpabilité» par ses habitants. Les façades de leurs maisons ne sont-elles pas blanches comme neige ? Ne tolèrent-ils pas justement chez eux la présence d’un Juif, preuve irréfutable qu’ils ne sont pas comme les «barbares» d’à côté ?
Ce Juif, c’est Andri, un jeune homme que le maître d’école aurait, selon la version officielle, courageusement enlevé des griffes du pays des Casaques Noires. Quel acte magnifique, se gargarise la population d’Andorra ! Enfin, jusqu’au moment où la menace d’invasion se précise… Là, cette même population se dit qu’il vaudrait peut-être mieux se débarrasser de cet encombrant réfugié, pour ménager la susceptibilité de la nation voisine, qui exècre le peuple juif.
Seul le père adoptif d’Andri sent que le venin de l’antisémitisme s’insinue doucement mais inexorablement : le menuisier ne veut pas d’Andri comme apprenti, le soldat le provoque continuellement, le médecin rechigne à le soigner, l’aubergiste à le servir. Le drame paraît désormais inéluctable.
Le maître d’école finit par dévoiler la vérité : Andri n’est pas juif mais le fruit d’une relation extraconjugale qu’il eut jadis avec une femme du pays des Casaques Noires. L’enseignant, n’ayant pas eu le courage d’assumer sa liaison, inventa de toute pièce la belle histoire du Juif sauvé d’une mort certaine. Or, il est malheureusement trop tard pour arrêter les loups. Andri, à force de subir la vindicte populaire, a totalement intériorisé les caractéristiques indûment prêtées au peuple juif. Il endosse fermement une identité qui n’est pas la sienne et cette «sur appropriation» lui sera fatale le jour où sa terre d’adoption est envahie par les troupes ennemies. Dignement, il décide alors de se livrer, répugné par l’attitude hostile de ceux qui désignaient Andorra comme un haut lieu de paix, de liberté et des Droits de l’Homme.
Note d’intention
Mécanismes de l’exclusion et de la haine
De d’origine franco-allemande, je me suis souvent interrogé sur les monstruosités commises par l’Allemagne nazie. Les pires horreurs ne sont pas uniquement l’oeuvre des puissants, mais aussi des « petites gens » dans leurs lâchetés et compromissions du quotidien. Des écarts, que l’on peut facilement mettre sur le compte d’un contexte extérieur indépendant, mais qui au final constituent un terreau fertile à une haine primaire et violente qui prendra toute son ampleur en cas de crise économique ou politique. La responsabilité de chacun est réelle dans certaines des pires horreurs commises collectivement.
La littérature germanophone d’après guerre a décortiqué les mécanismes de la haine qui ont mené – entre autre – au génocide juif, en identifiant leurs naissances dans ces actes du quotidien. Cette littérature est à la fois une tentative de compréhension (si cela est possible…), mais surtout un appel à la vigilance pour les générations futures.
L’Europe et la France d’aujourd’hui reproduisent certains de ces mêmes mécanismes : la recherche d’un bouc émissaire pour nos maux, la justification d’un racisme assumé, la considération de l’étranger ou de celui qui est différent comme menace et responsable de notre incapacité à réinventer le monde dans lequel nous vivons. Croire qu’une minorité a le pouvoir de faire échouer une société, c’est surtout nier notre propre responsabilité à cet échec.
Aujourd’hui, le Juif d’Andorra pourrait avoir bien d’autres identités… Mais, la mécanique est restée la même.
Andorra, malheureusement, surprend toujours aujourd’hui par sa justesse et sa pertinence. Il est donc important de réentendre un texte comme celui-là, pour cet appel au refus de la haine.
Scruter l’intime
Plutôt que de chercher les origines de cette haine dans un contexte culturel, social ou économique, Max Frisch va scruter l’intime de chaque individu, pour y déceler les échecs, frustrations et souffrances, qui projetés sur celui qui est différent ou en situation de faiblesse, deviendront exclusion, rejet puis haine.
Attribuer à l’autre ses propres défauts, le rendre responsable de ses propres échecs, permet non seulement de se dédouaner de toute responsabilité, mais aussi de s’exorciser de ces souffrances. Andri deviendra malgré lui ce révélateur du dégoût de soi.
C’est démultipliés à l’infini que ces mécanismes deviennent une monstruosité, mais ils sont, à leur naissance, très humains, trop humains. Ce texte nous met face à nous même, et nous interroge sur ce que nous portons en nous, et sur notre vision des autres.
C’est cet axe de travail que j’ai choisi pour monter Andorra.
Documentaire théâtral
Sans modifier fondamentalement la structure de la pièce et sans procéder à une modernisation excessive du contexte d’Andorra, je souhaite que le spectacle prenne tous son sens dans ses résonances avec aujourd’hui.
Sorte de documentaire théâtral, le temps de la représentation sera la reconstitution d’un fait divers qui a eu pour conséquence la mort d’un jeune homme. Débute alors une enquête qui remonte le fil des événements jusqu’à cette mort.
Une histoire vivante, burlesque et émouvante.
Sur le plateau, trois pans de murs mobiles, qui dès le début de la représentation seront peints en blanc. Ils deviendront une rue, une place, l’intérieur d’une maison, une ligne de fuite, un écran… Un travail de troupe choral, précis et exigeant, pour porter cette histoire, à la fois vivante, rythmée, burlesque, souvent drôle, émouvante et violente.
Cette reconstitution est entrecoupée (comme dans le texte original de Frisch) par les témoignages de certains des protagonistes, qui déclinent à l’infini leur absence de responsabilité dans ces faits. Si le contexte historique n’est pas marqué sur le plateau, les témoins (présents sous forme de documentaire vidéo) eux sont bien ancrés dans la France de 2015.
Débute alors un dialogue entre un texte de 1961 et la France d’aujourd’hui, entre des comédiens qui jouent les personnages d’une fable et les vrais protagonistes, entre la réalité d’un meurtre collectif et sa justification à postériori.
Bien sûr, ce que dénonce Andorra est d’une très grande gravité. Mais sa forme, avec notamment le portrait des habitants – grandioses de mauvaise foi et affligeants de lâcheté – est l’occasion de scènes d’une très grande drôlerie.
Fabian Chappuis
Revue de presse
Au Théâtre 13-Seine, le jeune Fabian Chappuis met en scène Andorra, fable tragique composée en 1961. Peu jouée en France, la pièce étincelle d’échos très actuels avec des interprètes subtils. un spectacle en tous points accompli.
(…/…)
Il y a dans Andorra, telle que la monte Fabian Chappuis et telle que les comédiens la jouent, quelque chose d’une saveur poétique très particulière. On rit souvent. Les habitants d’Andorra sont coloriés comme des petits hommes ordinaires. Faibles, égoïstes, lâches, xénophobes, antisémites et cruels. Seuls Andri et sa sœur Barbeline (Elisabeth Ventura) ont des prénoms.
(…/…)
Cette humanité ordinaire fait les tragédies extraordinaires. Sans projeter le moindre calque, Fabian Chappuis nous parle évidemment aussi d’aujourd’hui. Il excelle à diriger les interprètes, très bien distribués. Chacun mériterait une longue analyse car les incarnations sont subtilement conduites, telle celles du père alcoolique ou du prêtre ou de Barbeline sensible et tendre. On l’a dit, Romain Dutheil est particulièrement convaincant. Il est juste, sensible, sans excès pathétique. Bref, une excellente soirée.
Armelle Héliot – Le Figaro
On aime beaucoup (TT)
C’est vif, astucieux. Les dix comédiens forment une belle équipe. Un spectacle d’actualité.
Sylviane Bernard-Gresh – Télérama
Un appel vibrant à la vigilance
Fabian Chapuis vient de créer au Théâtre 13 une magnifique adaptation l’œuvre de Max Frisch. Un très beau spectacle aux influences » Brechtiennes ». Les comédiens, tous dotés d’une forte présence scénique, nourrissent avec force le propos de cette pièce. Max Frisch, en écrivant cette oeuvre 20 ans après la fin de la 2e guerre mondiale, lance un appel vibrant à la vigilance. Laurent Schteiner – Théâtres.com
Un jeu d’un naturalisme vibrant
Une mise en scène épurée, servie par un jeu d’un naturalisme vibrant, ponctué de belles embardées oniriques.(…/…) De Romain Dutheil à Alban Aumard (savoureux docteur, grotesque dans sa pédanterie), en passant par Stéphanie Labbé (excellente en aubergiste), les dix comédiens sont à la hauteur de ce pari. Ils nous ravissent autant qu’ils nous plongent dans l’effroi. Anaïs Heluin – Time out
Fabian Chappuis ressuscite Andorra avec brio
Ici, le théâtre joue pleinement son rôle de miroir social révélant les mécanismes haineux du rejet de l’autre, de l’exclusion de l’étranger. Andri est le réceptacle des fantasmes et des peurs des uns et des autres, qui tous lui façonnent une identité différente. Au final, c’est lui-même qui ne se retrouve plus à force d’être rejeté et réinventé.
Dans une scénographie qui fait coulisser des pans de murs blanchis par l’oubli, Andorra, comédie noire, nous interpelle avec force. Hélène Kuttner – Artistik Rezo
Tragique et bouleversante
La mise en scène de Fabian Chappuis, très sensible, est dépouillée comme le préconisait Max Frisch. Tragique et bouleversante, la pièce a néanmoins des versants comiques avec les scènes notamment entre le Docteur, un fieffé raciste et Andri. Les comédiens de la Compagnie Orten la jouent de façon très vivante. Cette pièce qui a nécessité une longue genèse – le scénario date de 1946 mais la rédaction de la pièce ne fut achevée qu’en 1961 – nous interpelle intimement. Nous le savons, ces Andorriens qui font si bonne figure, nous pouvons en faire partie, ne serait-ce que par notre silence ! Evelyne Tran – Le Monde.fr
Le Théâtre 13 présente une pièce formidable et effrayante.
Le texte comme la mise en scène frappent par leur justesse et leur pertinence. La haine est traitée par le biais de l’individu, de l’intime. Ce n’est pas la société qui est montrée du doigt mais ceux qui la composent. Et à travers leurs faiblesses, leurs échecs, leurs ressentiments, la haine naît et s’installe dangereusement. Andorra replace l’humain au cœur de ce qu’on a trop souvent qualifié de mécanisme politique, despotique et calculatoire. L’apport de Fabian Chappuis est considérable dans la modernisation et la résonnance de la pièce avec les événements récents qui font l’actualité. Ce documentaire théâtral est à la fois nécessaire, brutal, émouvant et cruel. A voir absolument ! A nous Paris
Chronique de la haine ordinaire
C’est une pièce qui date de 1961, et qui reste pourtant d’actualité 55 ans après. Un écho contemporain qui parle d’antisémitisme, et plus largement de haine, d’exclusion, de cruauté et de bêtise. Elle explore même les ressorts de l’humain quand il produit de l’inhumain, dans une ambiance claire-obscure teintée de mystère, mais aussi d’humour. Jean-François Cadet – RFI
Bande annonce vidéo
Réalisation Quentin Defalt
Musique Cyril Romoli
Rencontre
Rencontre
avec Fabian Chappuis et toute l’équipe artistique
le dimanche 24 janvier à l’issue de la représentation vers 17h45.
Garde d’enfants
Garde d’enfants
dimanche 31 janvier 2016 pendant la représentation de 16h
(6€ par enfant de 5 à 11 ans).
Spectacle de conte / atelier / goûter avec Carole Visconti
(réservation indispensable).
Audiodescription
Audio-description pour les personnes mal ou non-voyantes
Système d’audio-description en direct via casque récepteur
En partenariat avec l’association Prête-moi tes yeux au théâtre
Andorra sera audio-décrit les 28 et 31 janvier, 4 et 7 février 2016
Service gratuit. Tarif réduit pour le spectateur ainsi que pour un accompagnateur.
Réservation auprès d’Yselle Bazin (01 45 88 41 89 / ysellebazin@theatre13.com).
En tournée
Prochaines représentations :
11 mars 2016 à 20h30
Théâtre Victor Hugo de Bagneux
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15 mars 2016 à 20h30
Espace 93 – Clichy-sous-Bois
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14 mai 2016 à 20h30
Espace Culturel Le Parc – Ribeauvillé
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